Les travaux anatomiques de plusieurs équipes ont établi qu’il existait schématiquement deux types d’enthèses, appelés fibreuses et fibrocartilagineuses [2]. Les enthèses fibreuses encore appelées directes, constituent les attaches sur des zones osseuses métaphysaires ou diaphysaires, (telle que l’insertion du deltoïde sur l’humérus). Ces enthèses fibreuses ne comprennent qu’un tissu conjonctif fibreux dense entre le tendon et l’os et semblent moins impliquées dans des processus physiopathologiques. Certaines d’entre elles constituent une attache osseuse sur le périoste, d’autres sont directement osseuses [3]. Les enthèses fibrocartilagineuses constituent les insertions sur les épiphyses des os longs ou sur de petits os tels que ceux du carpe et du tarse. L’histologie de ces enthèses fibrocartilagineuses est tout à fait originale et mérite d’être connue lorsque l’on veut aller plus loin vers la physiopathologie de ces tissus. Ainsi, cette région enthésique peut être divisée en quatre zones [4,5] (Fig. 1). En allant du tendon vers l’os, la première zone comprend l’extrémité tout à fait distale du tendon. Elle est constituée de façon classique, d’un tissu lamellaire orienté constitué de faisceaux de collagène orientés séparés par un tissu conjonctif plus lâche interfasciculaire relié en périténon et refermant un nombre variable de fibres élastiques ; au sein de cette matrice sont dispersées des cellules allongées fibroblastiques, les ténocytes. Le passage dans la seconde zone, le fibrocartilage, se fait progressivement, sur quelques microns. Les cellules adoptent un phénotype chondrocytaire, devenant arrondies, se disposant par paires ou en rangées, et se plaçant dans des lacunes de la matrice extracellulaire. La matrice extracellulaire elle-même est en continuité avec celle de la première zone. Un peu plus en profondeur, le passage dans la troisième zone se fait brutalement. Cette zone est en effet, caractérisée par la minéralisation du fibrocartilage, le début de cette minéralisation se traduisant histologiquement par l’apparition d’une ligne basophile (bleue) entre les deux types de fibrocartilage. Sous cette couche de fibrocartilage minéralisé, se situe la quatrième zone qui est constituée par l’os, structuré en os trabéculaire.

Références :

[2] Benjamin M, Ralphs JR. Fibrocartilage in tendons and ligaments. An adaptation to compressive load. J Anat 1998;193:481–94.
[3] Benjamin M, Kumai T, Milz S, Boszczyk BM, Boszczyk AA, Ralphs JR. The skeletal attachment of tendons-tendon ’entheses’. Comparative Biochemistry And Physiology PartA Molecular and Integrative Physiology 2002;133:931–45.
[4] Rufai A, Ralphs JR, Benjamin M. Strucuture and histopathology of the insertional region of the human achilles tendon. J Orthop Res
1995;13:585–93.
[5] Cooper RR, Misol S. Tendon and ligament insertion. A light and electron microscopic study. J Bone and Joint Surg 1970;52-A:1–20.

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Aspect histologique d’une enthèse (insertion du vaste externe sur le grand trochanter).
De droite à gauche : extrémité tendineuse puis fibrocartilage puis tissu osseux et moelle osseuse. HES (× 100).

Le terme de « fibres de Sharpey » est souvent utilisé dans les descriptions des enthèses. Or, la nature exacte de ces « fibres perforantes » décrites en 1856 par Sharpey [6], qui seraient censées ancrer l’enthèse elle-même dans l’os, est
très débattue [3,7]. Benjamin et François s’accordent à considérer que ce réseau de fibres denses continues ne se verrait que dans les enthèses fibreuses, alors que d’autres auteurs les évoquent au sein même d’enthèses comprenant un fibrocartilage (dans [3]).

La vascularisation de cette région est assurée principalement par les vaisseaux du périténon et ceux du périoste (dans [8]). Certains travaux plus récents illustrent également la grande proximité des vaisseaux de la moelle [9]. L’enthèse semble être une zone métaboliquement très active [10]. Les structures enthésitiques sont en général bien innervées, comprenant des fibres nerveuses proprioceptives et des récepteursà la douleur [11].

Références :

[3] Benjamin M, Kumai T, Milz S, Boszczyk BM, Boszczyk AA, Ralphs JR. The skeletal attachment of tendons-tendon ’entheses’. Comparative Biochemistry And Physiology PartA Molecular and Integrative Physiology 2002;133:931–45.
[6] Sharpey W, Ellis G. Elements of anatomy by Jones Quain. 6th ed. London:Walton and Maberley; 1856. p. 120.
[7] François RJ, Braun J, Khan MA. Entheses and enthesitis: a histopathologic review and relevance to spondyloarthritides. Curr Opinion In Rheumatology 2001;13:255–64.